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« Femmes ! » : un projet pour briser l’isolement vécu par les femmes immigrantes

Jeudi 17 mars 2022 11:00 Juliette Poireau
IMAGE : TVRS

La Carrefour le Moutier a mené un projet de recherche-action participative féministe dans l’objectif de briser l’isolement vécu par les femmes immigrantes de Longueuil et de soutenir leur autonomisation. 

D’une durée de un an, ce projet a permis d’accompagner 16 femmes immigrantes provenant des quatre coins du monde dans leur intégration au sein de leur terre d’accueil, le Québec.

Chapeautée par Francia Gallego, responsable du projet, et Jana Martic, chargée de la recherche, cette initiative a mis en lumière les impacts significatifs que l’isolement peut avoir dans la vie des nouvelles arrivantes et défini certaines pistes de solutions pour combattre cette solitude.

Afin que toutes les participantes aient le même degré d’implication, de l’interprétariat en espagnol, en anglais, en arabe et en perse était offert tout au long du projet. De plus, les profils des femmes étaient divers. Âgées de 21 à 73 ans, certaines étaient résidentes permanentes, d’autres des demandeuses d’asile, la majorité avait un diplôme, la moitié des enfants en bas âges. « Il fallait créer un espace où chacune se sent entendue et comprise », explique Jana.

L’isolement affectant les femmes immigrantes semble être une conséquence de multiples facteurs entrecroisés et leur amplification, provoqué fondamentalement par des défis structurels, notamment la barrière de la langue, la non-reconnaissance de leurs expériences antécédentes et l’offre de services, soulève le rapport de recherche.

Le projet de recherche-action a été élaboré en cinq étapes : la rencontre entre les femmes et les modalités du projet, définir l’isolement vécu par chacune des participantes et les causes sur leur vie, proposer des stratégies d’actions pour combattre l’isolement, l’implantation des activités suggérées par les femmes, et l’évaluation des impacts du projet.

Par l’entremise de groupes de discussion, les femmes ont raconté comment elle vivait leur isolement. « L’isolement, c’est une prison faite par toi-même », a exprimé Nanou. En effet, le rapport démontre que les femmes isolées se sentent emprisonnées, rejetées et séparées des autres. Des conséquences physiques sont aussi engendrées par l’isolement, dont la perte de l’estime de soi, l’insomnie et des problèmes de santé mentale.

« L’isolement, c’est la pire chose dans la vie. En deux ans, j’ai l’impression d’avoir vieilli de 20 ans », exprime Amani.

Les participantes ont réfléchi ensemble sur des stratégies qui les aideraient à combattre leur isolement. À travers les discussions, plusieurs pistes de solutions ont été proposées : réaliser des activités sociales et culturelles, créer des cellules communautaires, offrir des ateliers sur différents thèmes et lutter pour des changements systémiques.

Les femmes ont donc organisé des échanges culturels, des discussions de groupe, un atelier sur l’estime de soi, un atelier pour connaître les ressources sociocommunautaires disponibles, une sortie socioculturelle, un partage pour mieux connaître la culture québécoise, une activité sportive et des échanges pour promouvoir et pratiquer la langue française.

« Grâce à ce projet et aux histoires partagées de mes chères femmes, je sens que je suis moins isolée, déclare Amani. J’ai compris que l’isolement, ce n’est pas parce que tu es seule, mais parce que tu manques de confiance en toi. »

Selon le rapport, le projet a soutenu l’autonomisation de chacune des participantes. « Toutes les femmes qui ont participé au projet disent être plus conscientes de leurs forces, leurs capacités et leurs limites, mentionne Francia. Elles ont toutes également une plus grande connaissance des ressources externes à leur disposition. Elles sont donc mieux outillées pour agir sur des conditions limitantes. »

À la lumière de ce projet, les initiatrices ont remarqué plusieurs éléments qui ont facilité le changement et l’autonomisation des participantes : « L’un d’entre eux est d’avoir créé un espace sécurisant et sans jugement pour que chacune des participantes puisse s’exprimer et parler librement de ce qu’elles vivent, explique Jana. Aussi, le fait d’écouter les histoires des autres femmes immigrantes a permis de conscientiser les participants sur différentes réalités, et certaines ont même dit avoir trouvé le courage d’avancer. Un autre élément était celui de l’autoréflexion, donc de poser des questions qui vont mener à une introspection, et surtout de prendre un moment pour soi. »

De plus, les initiatrices recommandent d’offrir du soutien individuel au besoin et de s’assurer que les femmes qui souhaitent briser leur isolement soient engagées dans ce processus.

Au début du projet, 37 femmes ont mentionné se reconnaître dans cette problématique de l’isolement, et 27 ont participé à au moins une rencontre. À la fin, 16 femmes ont complété la démarche. Ainsi, 47 % des participantes ont mis fin à leur implication, car elles avaient d’autres priorités, dont le travail et la vie familiale.

C’est pourquoi Jana Martic souligne l’importance de s’adapter aux disponibilités des femmes qui souhaitent combattre leur isolement, car il s’agit d’une procédure complexe qui demande de l’engagement.

Rappelons que l’agglomération de Longueuil compte 7,5 % de toute la population immigrante du Québec, et que les femmes immigrantes sont plus susceptibles de se retrouver en situation de précarité économique.

Même si le projet est terminé, le Carrefour le Moutier poursuit sa mission en organisant des activités dédiées aux femmes immigrantes.

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